Advenant que Donald Trump tienne ses promesses de réduction d’impôts en plus de hausser les dépenses militaires et d’infrastructures, la dette publique américaine pourrait augmenter rapidement au cours des prochaines années. Si la demande pour les nouvelles obligations ne suivait pas, les taux d’intérêt devraient augmenter davantage pour attirer les acheteurs. Cela s’ajouterait à d’autres facteurs poussant les taux à la hausse, tels que les anticipations d’inflation plus élevées et le risque accru d’insolvabilité.

Le gouvernement américain a généralement de la facilité à écouler sa dette. Depuis le début des années 2000, la demande étrangère a particulièrement été au rendez-vous. La part de la dette détenue par des étrangers est passée d’environ 17 % en 2002 à près de 35 % en 2012. Cette part a par contre plafonné et a même commencé à diminuer récemment. Parmi les explications de ce changement, on note que la Chine réduit maintenant ses réserves d’actifs étrangers alors qu’auparavant elle les augmentait rapidement. Ces réserves sont composées en bonne partie de titres américains. La baisse des prix du pétrole peut également être pointée du doigt, car de nombreux pays doivent maintenant puiser dans leurs réserves d’actifs étrangers pour pallier la baisse de leurs revenus pétroliers ou pour soutenir leur monnaie respective.
D’autres acheteurs étrangers pourraient prendre le relais, mais le potentiel apparaît tout de même limité sans des joueurs importants comme la Chine et les grands pays exportateurs de pétrole. Il faut aussi prendre en considération que Donald Trump envisage d’appliquer des mesures protectionnistes afin d’améliorer le solde commercial américain. Or, un lien étroit existe entre les flux de capitaux et les flux commerciaux. Si la nouvelle administration américaine parvient à réduire le déficit commercial des États‑Unis, cela signifiera qu’elle aura aussi réduit les entrées de capitaux étrangers.
Le contexte risque donc de nécessiter une forte hausse de la demande nationale pour les obligations du gouvernement américain. La Réserve fédérale a été un gros acheteur durant les années où elle a accru la taille de son bilan, mais cette époque est révolue avec le resserrement monétaire qui a été enclenché.
Pour compenser une hausse de l’endettement public, les entreprises et les ménages américains devront donc répondre par une réduction dans le rythme des investissements et par une augmentation de l’épargne. En sciences économiques, ce phénomène est appelé l’effet d’éviction.
Implications
Il n’a pas vraiment lieu de douter qu’il y aura des acheteurs advenant une forte hausse des émissions d’obligations américaines. On peut toutefois s’inquiéter de l’augmentation des taux d’intérêt qui serait nécessaire pour attirer ces acheteurs et des effets que cela aurait sur l’investissement et la consommation. Sans mesure protectionniste, on pourrait penser que la demande étrangère absorberait une partie des besoins financiers additionnels des Américains, mais cela risque de ne pas être le cas. Au final, l’effet bénéfique des mesures promises par Trump risque d’être freiné par une croissance plus modérée de l’investissement. La consommation pourrait bénéficier des baisses d’impôts, mais l’augmentation de l’épargne annulerait une partie de cet effet.